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jeudi 5 juillet 2012

Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". Remerciements.

En ce qui concerne la mini-série sur "Les Misérables" (1862), je me suis bien sûr servi du roman et des dossiers contenus dans les différentes éditions. Mais je tiens aussi à remercier tout particulièrement monsieur Pierre BAUDRIER, historien travaillant sur le sujet et la période, qui a eu la gentillesse de me contacter et de m'envoyer beaucoup de documentation scientifique sur l'Insurrection de 1832, qui m'a permis d'être aussi précis dans le contexte et les explications.

Dimanche 17 Juin 2012 : Second tour des 14èmes Élections législatives de la Vème République française.

Oui, je sais, je suis en retard. On va dire que c'est pour nos amis canadiens qui n'auraient pas suivi la politique française ce dernier mois. Et comme de toute façon c'est passé, je ne ferai pas de la réclame pour pousser les gens à aller voter. Notez qu'au vu de l'abstention, j'aurais peut-être dû...


I Résultats du premier tour.

Le premier tour se tenait le Samedi 2 Juin 2012 dans les 11 Circonscriptions de l’Étranger (Amérique du Nord ; Amérique latine ; Europe du Nord ; Benelux [Royaume de Belgique, Royaume des Pays-Bas, Grand Duché du Luxembourg]; Péninsule ibérique et Principauté de Monaco ; Confédération des Cantons suisses ; Europe centrale ; Europe du Sud, République de Turquie et État hébreu d'Israël ; Afrique du Nord-Ouest ; Afrique du Centre, Afrique du Sud et Afrique de l'Est ; Europe de l'Est, Asie, Océanie). Il se tenait le Samedi 9 Juin 2012 dans les Départements et Territoires d'Outre-Mer (D.O.M.-T.O.M.) et le Dimanche 10 Juin 2012 en France métropolitaine.

Le décalage d'une semaine des Circonscriptions de l’Étranger s'explique par le fait que les candidats avaient besoin de deux semaines pour faire campagne efficacement pour le second tour dans leurs gigantesques circonscriptions.

J'en profite pour compléter mon tableau des candidats pour l'Amérique du Nord, qui étaient 18 et non pas 14, j'ai appris l'existence des quatre derniers lors de la publication des résultats. Ils n'ont pu faire campagne jusqu'à Québec faute de moyens (ils ont fait 0,00% à Québec). Il s'agissait de quatre Indépendants : Jean-Michel VERNOCHET, Rob TEMÈME, Louis le GUYADER et Mike REMONDEAU. Mes plus plates excuses pour ne pas les avoir inclus dans mon premier article.

Voici les résultats nationaux du premier tour.

Abstention: 42,78% (très forte...) des citoyens inscrits sur les listes électorales.
Votants: 57,22% des citoyens inscrits sur les listes électorales.

Votes blancs et nuls: 1,58% des votants.
Suffrages exprimés: 98,42% des votants.

Majorité présidentielle de Gauche: 39,86% des suffrages exprimés, 25 candidats élus dès le premier tour.
_Parti Socialiste (P.S.): 29,35% des suffrages exprimés, 22 candidats élus dès le premier tour.
_Europe Écologie - Les Verts (E.E.-L.V.): 5,46% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Parti Radical de Gauche (P.R.G.): 1,65% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Divers Gauche (D.V.G.) et Dissidents du Parti Socialiste (P.S.): 3,40% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
Opposition de la Droite parlementaire: 34,66% des suffrages exprimés, onze candidats élus dès le premier tour.
_Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 27,12% des suffrages exprimés, 9 candidats élus dès le premier tour.
_Divers Droite (D.V.D.) et Dissidents de l'Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 3,51% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Nouveau Centre (N.C.): 2,20% des suffrages exprimés, un candidat élu dès le premier tour.
_Alliance Centriste (A.C.): 0,60% des suffrages exprimés.
_Parti Radical Valoisien (P.R.V.): 1,24% des suffrages exprimés.
Centristes et Indépendants: 2,73% des suffrages exprimés.
_Mouvement Démocrate (MoDem) renommé "Centre pour la France": 1,77% des suffrages exprimés.
_Écologistes indépendants: 0,96% des suffrages exprimés.
Extrême-Gauche: 7,89% des suffrages exprimés.
_Front de Gauche (F.d.G.): 6,91% des suffrages exprimés.
_Autres partis ou candidats d'Extrême-Gauche sans étiquette: 0,98% des suffrages exprimés.
Extrême-Droite: 13,79% des suffrages exprimés.
_Front National (F.N.) rebaptisé "Rassemblement bleu marine pour une Alliance nationale": 13,60% des suffrages exprimés.
_Autres candidats d'Extrême-Droite sans étiquette: 0,19% des suffrages exprimés.
Régionalistes & Indépendantistes (Pays basque, Île de Corse, Départements et Territoires d'Outre-Mer [D.O.M.-T.O.M.]): 0,56% des suffrages exprimés.
Indépendants, Solidarité & Progrès (S&P) et Parti Pirate (P.P.): 0,52% des suffrages exprimés.

À noter que 36 candidats ont réuni 50% des suffrages exprimés au premier tour et ont donc été élus directement.

En Amérique du Nord, 1ère Circonscription des Français de l’Étranger, voici ce que ça a donné.

Abstention: 79,6% (!) des 159.683 inscrits sur les listes électorales consulaires. Cela s'explique par le désintérêt, le peu de publicité, et surtout un immense cafouillage technique des votes par courrier ou Internet, faisant que les votes par correspondance, tant vantés, n'ont finalement pas été comptabilisés.
Votants: 20,4% des 159.683 inscrits sur les listes électorales consulaires.

Votes blancs et nuls: 1,1% des votants.
Suffrages exprimés: 98,9% des votants.

_Corinne NARASSIGUIN (Parti Socialiste [P.S.] & Europe Écologie- Les Verts [E.E.-L.V.]): 39,65% des suffrages exprimés.
_Frédéric LEFEBVRE (Union pour un Mouvement Populaire [U.M.P.]): 22,08% des suffrages exprimés.
_Émile SERVAN-SCHREIBER (Divers Droite [D.V.D]): 6,69% des suffrages exprimés.
_Julien BALKANY (Dissident U.M.P.): 6,61% des suffrages exprimés.
_Antoine TREUILLE (Divers Droite [D.V.D.]): 5,10% des suffrages exprimés.
_Carole GRANADE (Mouvement Démocrate [MoDem] du Centre pour la France): 4;94% des suffrages exprimés.
_Claire SAVREUX (Front National [F.N.] & Rassemblent bleu marine pour une Alliance nationale): 4,29% des suffrages exprimés.
_Céline CLÉMENT (Front de Gauche [F.d.G.]): 2,85% des suffrages exprimés (dont le mien, mais que voulez-vous... l'Amérique du Nord n'est pas communiste).
_Gérard MICHON (Dissident U.M.P.): 2,23% des suffrages exprimés.
_Philippe MANTEAU (Nouveau Centre [N.C.]): 1,41% des suffrages exprimés.
_Raphaël CLAYETTE (Parti Pirate [P.P.]): 1,29% des suffrages exprimés.
_Christophe NAVEL (Divers Droite [D.V.D.]): 1,28% des suffrages exprimés.
_Stéphanie BOWRING (Parti Radical de Gauche [P.R.G.]): 1,04% des suffrages exprimés.
_Karel VEREYCKEN (Solidarité & Progrès [S&P]): 0,38% des suffrages exprimés.
_Jean-Michel VERNOCHET (Indépendant): 0,05% des suffrages exprimés (17 votants, l'équipe de campagne...).
_Rob TEMÈME (Indépendant): 0,05% des suffrages exprimés (pas mieux...).
_Louis le GUYADER (Indépendant): 0,03% des suffrages exprimés (10 votants, les proches...).
_Mike REMONDEAU (Indépendant): 0,02% des suffrages exprimés (6 votants, la famille proche...).

C'est donc un duel entre la socialiste-écologiste Corinne NARASSIGUIN et le parachuté U.M.P. Frédéric LEFEBVRE qui s'annonce.


II L'entre-deux tours.

Oh, ce fut marqué par quelques couacs amusants.

En France tout d'abord.
Jean-Luc MÉLENCHON (1951- ), meneur du Front de Gauche, était allé défier Marion Anne Perrine "Marine" LE PEN (1968- ) sur ses terres à Hénin-Beaumont, zone désindustrialisée du Pas-de-Calais. Ecrasé au premier tour, il a dû s'effacer devant le candidat socialiste Philippe KEMEL.
À La Rochelle, Marie-Ségolène ROYAL (1953- ), ancienne candidate socialiste à l'élection présidentielle de 2007, parachutée dans la ville, se trouve confrontée à un adversaire local de gauche, Olivier FALORNI, qui refuse de se désister.
L'U.M.P. commence à se déchirer entre les tenants de la Droite parlementaire et républicaine, les libéraux, et ceux qui veulent aller chercher les électeurs de l'extrême-droite.

En Amérique ensuite.
La campagne n'intéresse personne ou presque.
Frédéric LEFEBVRE, alors même que la circonscription a été taillée sur mesure pour lui en 2010, se trouve en mauvaise posture. En effet, seuls Julien BALKANY et Gérard MICHON lui apportent leur soutien. Tous les autres candidats, même de Droite, soutiennent la Socialiste car elle est une candidate locale, travaillant et vivant à New-York. LEFEBVRE se croit alors obligé de rappeler que lui aussi est un candidat local. Il a vécu en Amérique de sa naissance jusqu'à l'âge de 18 mois. Puis, il se livre à un jeu de désinformation et de mensonge qui le décrédibilise aux yeux de ceux qui suivent la campagne. Heureusement pour lui, les Français d'Amérique sont surtout des cadres et des entrepreneurs, donc plutôt à droite, et surtout ils ne suivent pas l'entre-deux tours, car ça lui aurait été néfaste.

Le second tour se tient le Samedi 16 Juin 2012 dans les Circonscriptions de l’Étranger et dans les Départements et Territoires d'Outre-Mer (D.O.M.-T.O.M.), le Dimanche 17 Juin 2012 en France métropolitaine, de 8h à 20h.

III Résultats du second tour: composition de la XIVème Législature de la Vème République française.

Le couperet tombe. Il faut avoir 289 sièges pour disposer de la majorité absolue dans cette chambre de 577 députés. Les sondeurs estimaient d'abord que le P.S. aurait peut-être à partager la majorité avec le Front de Gauche, les Écologistes et leurs alliés de Gauche. Puis, qu'ils devraient pouvoir atteindre la majorité absolue avec l'aide des Divers Gauche.

Vers 21h30, Dimanche 17 Juin 2012, les premières estimations sont diffusées.



Abstention: 44,60% des citoyens inscrits sur les listes électorales, encore plus forte qu'au premier tour, les Français sont tannés de ces élections à répétition, pensent que la présidentielle suffit ou sont dégoûtés de la politique actuelle qui ne répond pas à leurs problèmes.
Votants: 55, 40% des citoyens inscrits sur les listes électorales.

Votes blancs et nuls: 3,85% des votants.
Suffrages exprimés: 96,15% des votants

Majorité présidentielle de Gauche: 49,96% des suffrages exprimés, 331 sièges, majorité absolue.
_Parti Socialiste (P.S.): 40,91% des suffrages exprimés, 280 sièges.
_Europe Écologie - Les Verts (E.E.-L.V.): 3,60% des suffrages exprimés, 17 sièges.
_Parti Radical de Gauche (P.R.G.): 2,34% des suffrages exprimés, 12 sièges.
_Divers Gauche (D.V.G.) et Dissidents du Parti Socialiste (P.S.): 3,08% des suffrages exprimés, 22 sièges.
Opposition de la Droite parlementaire: 34,66% des suffrages exprimés, 229 sièges.
_Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 37,95% des suffrages exprimés, 194 sièges.
_Divers Droite (D.V.D.) et Dissidents de l'Union pour un Mouvement Populaire (U.M.P.): 1,82% des suffrages exprimés, 15 sièges.
_Nouveau Centre (N.C.): 2,47% des suffrages exprimés, 12 sièges.
_Alliance Centriste (A.C.): 0,53% des suffrages exprimés, 2 sièges.
_Parti Radical Valoisien (P.R.V.): 1,35% des suffrages exprimés, 6 sièges.
Mouvement Démocrate (MoDem) renommé "Centre pour la France": 0,49% des suffrages exprimés, 2 sièges.
Front de Gauche (F.d.G.): 1,08% des suffrages exprimés, 10 sièges.
Extrême-Droite: 3,79% des suffrages exprimés, 3 sièges.
_Front National (F.N.) rebaptisé "Rassemblement bleu marine pour une Alliance nationale": 3,66% des suffrages exprimés, 2 sièges.
_Autres partis ou candidats et d'Extrême-Droite sans étiquette: 0,13% des suffrages exprimés, 1 siège.
Régionalistes & Indépendantistes (Pays basque, Île de Corse, Départements et Territoires d'Outre-Mer [D.O.M.-T.O.M.]): 0,59% des suffrages exprimés, 2 sièges.

Sachant que sur les 22 élus des Divers Gauche, 17 sont des dissidents socialistes ayant été accueillis à bras ouverts dans le Parti après la victoire, cela donne 297 sièges pour le Parti Socialiste (P.S.) à lui seul, donc une majorité absolue.


Pour la première fois depuis 1993, le Front National (F.N.) siège à l'Assemblée nationale. Il y avait été porté en 1986, avec 35 sièges, lorsqu'il s'était tenu une élection législative à la proportionnelle. Les deux élus sont l'avocat Gilbert COLLARD (1949- ), grande gueule arriviste qui navigue depuis longtemps dans les différents bords politiques et qui se retrouve bien dans les idées du F.N., et Marion MARÉCHAL-LE PEN (1990- ), nièce de Marine, jeune inexpérimentée de 22 ans pilotée par le grand-père toujours présent, Jean-Marie LE PEN (1928- ). Et non, Marine LE PEN n'est pas là, battue à Hénin-Beaumont d'une centaine de voix par le socialiste Philippe KEMEL. L'autre élu d'extrême-droite défend l'obscur parti nationaliste de la Ligue du Sud, Jacques BOMPARD (1943- ), actuellement poursuivi en justice pour corruption et prise illégale d'intérêts... c'est beau la politique...

L'U.M.P. a morflé, bien rares sont les membres du gouvernement 2007-2012 à être réélus députés. Leurs alliés les lâchent. La guerre des chefs peut commencer pour la direction du parti, avec comme point de départ remettre un peu d'ordre dans la ligne et les idées. Bon courage, le P.S. a mis 10 ans pour y arriver.

Le centre disparaît, explosé, écrasé. François BAYROU (1951- ), qui avait réussi à donner corps et parti à cette idée en 2007, est battu dans son fief du sud-ouest. Il n'est désormais plus que conseiller municipal d'opposition à Pau... Le MoDem n'existe plus. La reconstruction viendra peut-être du Parti Radical (P.R.) de Jean-Louis BORLOO (1951- ).

Le P.S. compte une grande disparue. Ségolène ROYAL s'est fait balayer à La Rochelle. Elle qui visait la Présidence de l'Assemblée nationale, la voilà Présidente de la Région Poitou-Charente, pis c'est tout.

Mon grand regret est la disparition du Front de Gauche, qui revient aux 10 sièges habituels, bien loin des espoirs soulevés par la vague rouge des présidentielles.

Maintenant, y'a plus qu'a. On verra bien ce que ça va donner, mais je n'espère pas grand chose vu la crise actuelle et la carrure de nos politiciens d'aujourd'hui...

En Amérique du Nord, ça a donné ça.

Abstention: 80,90% des inscrits sur les listes électorales consulaires. Mêmes raisons qu'au premier tour.
Votants: 19,10% des inscrits sur les listes électorales consulaires.

Votes blancs ou nuls: 2,20% des votants.
Suffrages exprimés: 97,80% des votants.

_Corinne NARASSIGUIN (Parti Socialiste [P.S.] & Europe Écologie - Les Verts [E.E.-L.V.]): 54,01% des suffrages exprimés, élue. C'est pas que ça vaut grand chose vue la participation, mais voilà, c'est fait.
_Frédéric LEFEBVRE (Union pour un Mouvement Populaire [U.M.P.]): 45,99% des suffrages exprimés, battu.

À noter que l'U.M.P. avait taillé les Circonscriptions de l’Étranger pour s'assurer 8 sièges et en laisser 3 aux Socialistes. C'est le contraire qui s'est produit, bien fait !

Carte des résultats par circonscriptions. À noter une erreur sur la carte du monde: l’Amérique latine n'est pas rose, mais verte, ce sont les écologistes qui l'ont emporté.


mercredi 4 juillet 2012

Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". Interlude final.

Cette fois-ci, je vous passe une version anglaise de la comédie musicale "Les Misérables" (1985), adaptée de la version française de 1980 par Sir Cameron MACKINTOSH (1946- ). Ici, l'adaptation en chœur de "À la volonté du Peuple" (1980), qui devient "Do you hear the People sing ?" (1985). Les paroles sont aisées à comprendre et elle a de l'allure aussi pour clore cette mini-série. Extrait du Concert du 25ème Anniversaire le 3 Octobre 2010.



Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". 5°) 6 Juin 1832, la répression.

Au matin du 6 Juin 1832, Louis-Philippe est décidé à en finir. Il passe en revue les troupes devant le Château des Tuileries avant de les lancer de nouveau dans la bataille.

C'est d'abord l'artillerie qui entre en scène vers 7h du matin. Les redoutables Pièces de 8 des manufactures Gribeauval, qui sont encore pour deux décennies les meilleurs canons du monde avant que l'allemand Krupp ne révolutionne à nouveau l’artillerie au désavantage de la France. Par batteries uniques ou de deux pièces, les canons sont positionnés face aux barricades. Les premiers tirs à boulet sont sans effet contre ces monstres mous que sont les barricades. Vers 8h, ordre est donné de tirer à mitraille. C'est vicieux mais efficace. Les balles en rafale s'immiscent au travers des protections ou ricochent contre les murs des maisons dans les rues étroites, blessant ou tuant les insurgés imprudents qui ne sont pas mis à couvert contre le pavé ou à l'intérieur des bâtisses. Le pilonnage se poursuit jusqu'à 11h du matin.


Rue de la Chanverrerie, Enjolras et ses compagnons sont rejoints aux petites heures de l'aube par Jean VALJEAN. Fichus pour fichus, les insurgés libèrent de leur devoir cinq hommes. Inutile que quarante hommes périssent là où trente feraient le même travail. Mais pour passer sans risque, il leur faut un uniforme de la Garde nationale. Cinq hommes mais seulement quatre uniformes. Jean VALJEAN offre alors le sien. Le canon se met en place à l'angle de la Rue Saint-Denis. Gavroche atteint la barricade au premier coup de canon. Puis, le brutal se met à tousser à mitraille, fauchant les défenseurs. Pour gagner du temps, Enjolras couche en joue et abat le jeune Sergent d'Artillerie commandant la pièce. De son côté, Jean VALJEAN décoiffe au fusil deux observateurs de la Troupe postés sur un toit, sans les tuer, afin de leur prouver que le point n'est plus sûr et protéger la barricade des regards indiscrets.

À 10h, une compagnie de la Garde nationale charge sur la Barricade des Amis de l'ABC. Quelques salves bien ajustées les massacrent, mais font griller de précieuses cartouches aux défenseurs. De même, cette attaque improvisée a été balayée sur ses arrières par le canon, les artilleurs n'ayant point reçu l'ordre de cesser le feu... Victor HUGO s'inspire en fait d'une attaque lancée sur la barricade de la Rue Saint-Martin, emmenée par un fougueux officier de la Garde nationale qui a attaqué sans ordre, causant la mort d'un grand nombre d'hommes parmi la Troupe.

Vers 10h30, Rue Saint-Denis, le canon ouvre de nouveau le feu au boulet, visant le haut du mur afin d'y ouvrir une brèche. Le 55ème Régiment de Ligne avance alors prudemment, faisant feu tous les cinq pas, obligeant finalement les défenseurs à griller leurs cartouches, puis se replient. Le moral est bon parmi les insurgés mais les munitions sont au plus bas. Gavroche s'élance alors dans le brouillard qui suit les fusillades. Rapidement repéré par les soldats, l'enfant s'amuse à esquiver les tirs tout en ramassant les cartouches dans les musettes des soldats tombés. Une balle finit par l'atteindre à la tête, et il s'effondre en chantant la chanson de l'interlude précédent, fauché à 12 ans par l'Histoire et ses tumultes. Marius sort chercher Gavroche, suivi par Combeferre qui ramasse les munitions.


À 11h, les canons face au Quartier Saint-Merri ouvrent de nouveau le feu à boulet pour ébrécher les barricades en leur sommet. L'assaut final est imminent. Dernières désertions dans le camp des insurgés.

Au Cabaret Hucheloup, Jean VALJEAN reconnaît Javert ligoté, le forçat face au policier, la proie dominant la chasseur. Alors qu'Enjolras veut l'exécuter, VALJEAN se propose. Javert se prépare à mourir et raille VALJEAN qui le menace au pistolet et l'emmène Rue Mondétour. Pourtant, Jean VALJEAN tire en l'air, libère le policier et lui donne même son adresse. Javert en est fort ennuyé mais ne fait pas de vieux os dans les parages.

À 12h, l'assaut général est lancé sur ordre du Maréchal Jean-de-Dieu SOULT (1769-1851), ancien de l'Empire ayant retourné sa veste. Dans le Quartier Saint-Merri, la Troupe attaque sur trois axes : au nord par la Rue Saint-Martin, à l'est par la Rue du Cloître Saint-Merri, au sud par la Rue de la Verrerie. Du côté des Halles, l'assaut est donné depuis la Rue Saint-Denis en plein dans la Rue de la Chanverrerie. Cliquez pour agrandir.


Tout ce que Paris compte de troupes fidèles au Roi se lance dans l'assaut : Infanterie de Ligne (voir article précédent), Garde nationale (voir deuxième article), Gendarmerie royale de Paris (ci-dessous en haut) et même Sapeurs-Pompiers de Paris (ci-dessous en bas) chargés d'élargir la hache les brèches dans les barricades.


Ci-dessous, attaque de la barricade Rue Sainte-Catherine en 1848. Les attaques se font ainsi, en double ligne, au pas de charge, submergeant par le nombre.


La Troupe emporte facilement les barricades du Quartier Saint-Merri, à l'exception de celle de la Rue Saint-Martin, et butte devant le cloître transformé en redoute. Ce bastion insurgé résiste jusqu'à 13h30 et les 17 survivants seront achevés sans procès à la baïonnette. La barricade de la Rue de la Chanverrerie subit l'assaut de plein fouet et s'effondre rapidement. Les insurgés refluent en désordre vers le Cabaret Hucheloup. Marius, blessé à la tête, s'effondre. Jean VALJEAN l'attrape et parvient à fuir par la Rue Mondétour où il s'échappe par les égouts. Les soldats forcent alors la porte du cabaret, Enjolras et deux survivants parviennent à atteindre l'étage et détruisent l'escalier, qui est néanmoins escalader par les soldats. Ne reste alors qu'Enjolras de vivant. Il va être fusillé quand Grantaire, saoul depuis la veille au soir et qui cuvait sur une table de l'étage, s'éveille et vient se placer à côté de son ami. Ils sont abattus sur le champ.


À 13h30, tout est fini. La Ligne patrouille en surface, la Garde nationale dans les égouts. Jean VALJEAN manque d'être pris mais est aidé à la sortie du Grand Collecteur par Javert.

À 15h30, Jacques LAFFITTE (1767-1844), Hyacinthe Camille Odilon BARROT (1791-1873) et Dominique François Jean ARAGO (1786-183), signataire du livret qui a mis le feu aux poudres, se rendent aux Tuileries pour négocier l'arrêt des combats, et apprennent de la bouche de Louis-Philippe que tout est terminé.

La répression peut alors commencer. Dès le 6 Juin 1832, Paris est mis en état de siège, ce qui autorise les arrestations arbitraires. 200 personnes sont arrêtées, tant dans les milieux républicains que légalistes (DESCHAPELLES n'échappe pas à l'arrestation et CHATEAUBRIAND lui-même est inquiété). Louis-Philippe craint néanmoins que les jurys populaires des cours d'assise ne se montrent trop cléments envers les Républicains, comme ça a toujours été le cas. Il passe donc au-dessus de la Charte 1830 (qui a valeur de Constitution) et fait traduire les accusés devant un Conseil de Guerre le 10 Juin 1832. Ce faisant, il passe outre l'Article 54 qui stipule "Il ne pourra en conséquence être créé de commissions et de tribunaux extraordinaires, à quelque titre et sous quelque dénomination que ce puisse être.". Le peuple gronde à nouveau. Le 18 Juin, toutes les condamnations sont envoyées en cour de cassation, qui s'appuie sur la Charte et renvoie tout ce beau monde en cour d'assise. Louis-Philippe est dépité mais ses craintes ne sont pas fondées. Les jurys se montrent sévères, peut-être à cause de la présence de légalistes, et prononcent 82 condamnations (sur 136 accusés) dont 7 à mort, que le Roi communie en déportation dans les Colonies royales françaises de Guyane. DESCHAPELLES est libéré. Son coup de force pour déstabiliser la Monarchie de Juillet a échoué, Charles X perd peu à peu ses espoirs de revenir au pouvoir en France.

Ainsi s'achève cette insurrection de 1832, rendue célèbre par un roman mais que l'Histoire populaire s'est refusé à retenir...

Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". Interlude.

Un extrait de la comédie musicale "Les Misérables" (1980), plus précisément du concept-album. Paroles de Alain BOUBLIL (1941- ) et Jean-Marc NATEL sur une musique de Claude-Michel SCHÖNBERG (1944- ). Cette fois-ci, c'est la célèbre "Chanson de Gavroche" ou "La faute à Voltaire", dont les paroles du refrain reprennent textuellement celles écrites par Victor Marie HUGO (1802-2885) dans le roman "Les Misérables" (1862), les couplets ayant été un peu brodés en 1980... Voix du jeune Fabrice BERNARD.

Juin 1832-Juin 2012 : 180 ans de l'Insurrection républicaine des "Misérables". 4°) Nuit du 5 au 6 Juin 1832, les barricades.

Au soir du 5 Juin, la situation des insurgés paraît déjà désespéré. Enserrée entre le Quartier Saint-Merry et le Quartier des Halles, cernée par la Troupe et une majorité des bataillons de la Garde nationale, la Révolution de 1832 semble déjà un désastre. Monarchistes légalistes et Républicains se trouvent alors dans la même panade et unissent leurs forces pour consolider leurs positions. Les armureries du quartier sont pillées, mais l'équipement reste maigre. Des fusils à un coup à tabatière datant des années 1820, quelques pistolets guère plus récents, des fusils de chasse à deux coups, quelques sabres, et surtout beaucoup de couteaux et autres ustensiles tranchants détournés de leur usage premier.


Dans le crépuscule, des barricades sont élevées. L'art de bâtir une barricade est décidément la spécialité des Parisiens au XIXème siècle, et ces ouvrages défensifs ne cesseront de s'améliorer au fil du siècle pour trouver leur apothéose avec les gigantesques redoutes de la Commune de Paris en 1871. En 1832, le temps manque pour ériger de grands obstacles, mais cela suffit à bloquer les rues étroites de Paris. Les pavés sont arrachés et érigés de façon à bâtir un mur vertical côté attaquant, empilage irrégulier escaladable côté défenseur. Entre les pavés sont glissés des sacs de sable et des matelas pour amortir les coups de canons que l'attaquant viendrait à tirer. Au sommet du mur, un empilage de planches, de charrettes et d'objets en tout genre sert à protéger les défenseurs en position de tir et à gêner l'escalade de l'assaillant. Bien érigée (et pour peu que les défenseurs aient des réserves suffisantes en munitions), une barricade peut tenir en échec un grand nombre d'attaquant en étant défendue par relativement peu d'hommes. En 1848, la Barricade du Boulevard Saint-Antoine, monstruosité montant jusqu'aux étages des maisons, défendue sur ses arrières par d'autres barricades plus petites et par 82 hommes seulement, tint en échec 4.000 hommes pendant trois jours. Les images suivantes datent de la Révolution française de 1848 mais illustrent bien à quoi pouvaient ressembler des barricades à l'époque. (Celle sans annotation était située Rue Saint-Maur).


L'insurrection se concentre surtout dans le Quartier Saint-Merri. Le Quartier Général est sis dans le Cloître Saint-Merri (qui existe toujours) et la barricade-mère défend l'angle nord-ouest de l'édifice en bouclant le coin de la Rue Saint-Merri et de la Rue Saint-Martin (qui existent toujours et forment aujourd'hui le sud-ouest de la Place Georges POMPIDOU et son affreux Centre d'Art contemporain qui jure si mal avec les maisons voisines). Des barricades sont érigées aux alentours dans le quartier. Il y a un peu moins de 900 insurgés. Paris les a lâché.

Victor HUGO invente alors un cadre un peu excentré pour son roman. Les Amis de l'ABC érigent une barricade en face d'un de leurs cafés favoris, le Café de Corinthe, Rue de la Chanverrerie (aujourd'hui au numéro 102, Rue Rambuteau) et non Rue Saint-Denis (Victor HUGO cite cette rue car c'était à l'époque un axe important de la capitale, connu de tout le monde) qui est un peu à l'est et par où les soldats arriveront. Enjolras et ses amis tiennent leur quartier général dans le Cabaret Hucheloup, qu'ils transforment en redoute, sis à l'Angle de la Rue de la Verrerie (Rambuteau) et de la Rue Mondétour (au numéro 2) qui sert d’échappatoire car trop étroite pour que la Ligne se risque à attaquer, et surtout trop sinueuse pour qu'elle soit efficacement gardée. La Rue et le Passage Mondétour existent toujours et serpentent dans le Quartier des Halles. Cliquer pour agrandir.


Gavroche, malgré son jeune âge, prend une part active dans cette révolution qui s'annonce. Il reconnaît alors l'inspecteur Javert, mêlé aux insurgés, à qui il a déjà eu affaire et en averti Enjolras. Se sachant reconnu, Javert ne résiste pas et se retrouve ligoté à un pilier du Cabaret Hucheloup. Enjolras lui annonce qu'il sera fusillé à la minute où la barricade tombera. Gavroche hérite du fusil du policier. Marius est de faction Rue Mondétour. 54 insurgés défendent la barricade.


Vers minuit, un pas cadencé résonne aux environs du Quartier Saint-Merri. Louis-Philippe vient de lancer ses 38ème, 55ème et 66ème Régiments d'Infanterie de Ligne sur l'insurrection. Il s'agit d'abord de tester la résistance des barricades. Dans l'obscurité, un coup de force, ça peut passer. Pas une torche, obscurité totale sous un orage nocturne de début d'été. Les officiers lisent l'Avis d’Éviction demandant aux insurgés de se disperser. Devant le refus manifeste, ils lisent dans la foulée l'Acte d’Émeute, prévenant de l'assaut imminent. Puis, l'infanterie se met en ligne de tir, lâche deux décharges et avance. Les insurgés résistent à ce premier assaut, qui ne vise qu'à éprouver les défenses. Quelques barricades mineures sont enlevées au pas de charge mais les plus grosses tiennent. Le Quartier Saint-Merri ne tombera pas. Cet assaut coût plus cher aux défenseurs qu'aux assaillants. Les insurgés gaspillent de précieuses cartouches, tirées de trop loin, alors que les francs-tireurs de la Ligne abattent beaucoup de défenseurs révélés par leurs tirs. De sorte que dans la nuit du 5 au 6 Juin, bien que les positions restent inchangées, les insurgés ont subi plus de pertes que l'Autorité.


Sur la barricade du Café de Corinthe, le 55ème de Ligne ouvre le feu une première fois. Le drapeau rouge chute en dehors du mur. Qui pour le relever ? Un vieil homme se lève, le marguiller Mabeuf, pacifiste réduit à la misère par le régime. Il replace le drapeau et apostrophe la Ligne : "Vive la République !". La deuxième décharge de la Ligne l'abat. Les insurgés l'allonge pieusement sur une table du Cabaret Hucheloup et font de son manteau un étendard qu'ils arborent sur la barricade, causant la fureur de la Ligne qui prend l'habit pour un drapeau noir. L'assaut est donné, furieux, et manque d'emporter la barricade dont 14 défenseurs sont tués. La riposte arrive tardivement, bien qu'efficacement. Les soldats sont déjà en haut du mur, mais ils hésitent un peu trop. Un corps-)-corps sanglant s'engage. Gavroche, pourtant tenu à l'écart par Enjolras, est mis en joue par un soldat, le couche en joue et tire... en vain. Javert n'avait pas chargé sont fusil. De son côté, Courfeyrac (qui tient l'aile gauche) est en passe de perdre un combat face à un sous-officier. Deux coups de pistolet claquent, abattant les adversaires de Gavroche et de Courfeyrac. Marius PONTMERCY vient d'entrer dans la lutte. Mis en joue à son tour, il est sauvé par Éponine THÉNARDIER (déguisée en ouvrier) qui se jette devant le fusil du soldat et reçoit le coup à la place de Marius. PONTMERCY s'empare d'un baril de poudre dans le cabaret et menace de faire sauter la barricade. La Ligne recule, la barricade est sauvée. Jean PROUVAIRE a été fait prisonnier. Les insurgés l'entendent se faire fusiller Rue Saint-Denis.

Éponine, en mourant dans les bras de Marius, lui dévoile que Cosette lui a écrit et lui donne son adresse. Marius charge alors Gavroche (tentant de fait de l'éloigner de la barricade) de porter une lettre Rue de l'Homme armé (juste au nord du Quartier Saint-Merri...). L'enfant remplit sa mission à moitié. Au numéro 7, il tombe non pas sur Cosette mais sur Jean VALJEAN, récemment au courant de l'aventure de sa fille adoptive. Gavroche remet la lettre au bonhomme et s'en retourne vers la Rue Mondétour, chapardant au passage une charrette pour la barricade, véhicule qu'il sera obligé d'abandonner pour échapper à des Gardes nationaux Rue de la Verrerie. Jean VALJEAN ouvre la lettre de Marius, revêt son uniforme de la Garde nationale (comme tout bourgeois qui se respecte) et se dirige à son tour vers les barricades.

Excuse.

Je n'ai pas été très présent ces derniers jours, pour cause de retour en France et de semaines bien remplies ! Mais je vais me rattraper et tâcher de mettre mes blogues à jour dès aujourd'hui et avant mon départ en colonie de vacances lundi prochain. Bonne lecture.