Pages

samedi 24 mars 2012

Jeudi 22 Mars 2012 : Manifestation historique à Montréal.

Jamais le Québec ne connut pareille clameur...
 
I Ma journée.
 
Matin.
 
Bien sûr j'étais au courant pour la manifestation programmée de longue date. Québec avait prévu d'envoyer une forte délégation, tous les bus scolaires louables de la région avaient été réservés, mais il fallait s'inscrire auprès des associations étudiantes et j'avais reçu, par un hasard de la messagerie, le courriel pour cela deux heures trop tard. Donc bon, tant pis, un peu de recherche en bibliothèque et peut-être un piquetage ou deux pour le fun. De toutes façons, je ne me faisais guère d'illusions quant à mon heure de lever, je recharge encore mes batteries après l'automne éprouvant...
 
C'était sans compter un grand bruit qui me réveilla en sursaut au petit matin, 6h45. Trop tard pour se rendormir, pis tant qu'à être levé... Z'auront bien une place pour moi dans un des bus de l'ÆLIÉS (Association des Étudiants et des Étudiantes de Laval Inscrits aux Études Supérieures). Un brin de toilette ou deux, mon appareil photo, un lunch dans mon petit-sac-à-dos-de-sport-de-lycée-à-6€-même-qu'il-est-amorti-depuis-sept-ans-que-je-l'ai, mon drapeau de la Province du Québec (décoratif au départ, mais qui va prendre l'air pour la deuxième fois de sa vie au cours d'une manif') et en route mauvais troupe. Ah ! J'ai failli oublier mon carré rouge, symbole des étudiants grévistes contre la hausse de 1625$CAN des frais de scolarité. Comment, vous êtes pas au courant ? Regardez plus bas. La radio m'informe d'ailleurs que depuis mon dernier article, ce ne sont plus 217.000 étudiants en grève mais près de 310.000.
 
La journée promet d'être magnifique. Le printemps arrive franchement, apportant avec lui le chaud soleil de mars (Rappel : Québec est à la latitude de Bourges, Montréal à celle de Bordeaux, donc le soleil cogne pas mal à cette saison) et de belles températures de 25°C. C'est sous un ciel radieux que j'embarque dans l'autocar n°3 de l'ÆLIÉS, où je lie connaissance avec un étudiant en médecine. Nous autres en 2ème et 3ème Cycles (Maîtrise et Doctorat) sommes d'accord sur un point : notre grève se veut solidaire. Nos études sont finies ou presque, nous ne subirons pas la hausse mais la combattons quand même aux côtés du 1er Cycle pour les actuels Cégépiens et secondaires qui paieront le prix fort. Trois heures et deux muffins au chocolat plus tard, nous sommes en vue de Montréal.
 
Soirée.
 
 
Je m'éloigne du cortège en longeant les quais du Vieux Port de Montréal, seul endroit où l'on peut circuler à peu près correctement. Je finis par trouver ce fichu Quai King Edward et apercevoir mon autobus. Départ prévu à 17h mais le temps que tout le monde sorte de la foule, se repère, se retrouve, passe aux toilettes, toilettes qu'il a d'ailleurs fallu trouver (ce qui fut encore plus compliqué que de retrouver le car), nous ne sommes pas partis avant 18h15.
 
Un arrêt une heure trente plus tard sur une aire d'autoroute, pour souper. Nous débarquons à sept autobus, quatre cents personnes, dans un McDonald désert, à mi-personnel. Les pauvres serveurs, vous parlez d'un rush tardif !
 
Encore une heure et demie, et je regagne mes pénates, fatigué d'avoir piétiné mais heureux. Heureux et fier.
 
II La manifestation.
 
Nous débarquons au dessus du McGill College, université anglophone prestigieuse de Montréal, qui est passé complètement à côté du débat sur la hausse, et qui nous regarde passer sur son campus d'un œil dubitatif. Nous rejoignons un, puis deux, puis trois cortèges débouchant de diverses rues, de l'Université Laval, de l'Université de Rimouski, de l'Université de Sherbrooke, et encore aucun n'est vraiment au complet, tout le monde a pris des chemins divers. Quoiqu'il en soit, c'est au milieu presque dix mille personnes que je rejoins le lieu de rendez-vous du départ de la manifestation : la Place du Canada.
 
Place du Canada ? C'est ça.
 
 
Ils attendaient entre 30.000 et 100.000 personnes pour la manifestation. À 12h, deux heures avant le départ prévu du cortège, il apparaît que ce chiffre est battu. La place est pleine de manifestants, qui s'étalent loin dans les rues adjacentes. Au milieu des drapeaux rouges, des fanions bleus. Les Jeunesses Québécoises et des membres du Parti Québécois (PQ), qui forment une haie gentiment protectrice autour... de Pauline MAROIS (1949- ) en personne, la chef du parti. Ca n'étonne personne après ses déclarations de la veille ("Les étudiants ont raison de se battre contre la hausse des frais de scolarité !" en pleine Assemblée Nationale). Je cherche en vain des représentants de Québec Solidaire (QS), le PQ est quand même trop à droite à mon goût...


L'ambiance est très festive, la joie est palpable, il apparaît d'emblée que la manifestation est une réussite avant même de démarrer. Les étudiants sont majoritaires, bien sûr, mais il y a de tout. Des PQuistes comme je l'ai dit, des enseignants du primaire et du secondaire en grève pour protéger le futur droit à l'éducation de leurs élèves, élèves du secondaire qui d'ailleurs n'étaient pas absents de l'évènement, des infirmiers et des médecins qui protestent également contre la Taxe Santé (car oui, la hausse est un problème de forme comme un autre, c'est au fond qu'il y a un problème) et plein d'anonymes bienveillants portant fièrement le carré rouge en signe de soutien et pour exprimer leur ras-le-bol contre le problème de fond. Le problème ? Le gouvernement libéral qui se croit tout permis, qui refuse de débattre, qui refuse d'écouter, qui refuse de discuter ses décisions. Pour tout, pour la hausse, pour les taxes, pour le Plan Nord, rien à faire du peuple puisqu'ils sont au pouvoir. C'est cette attitude qui discrédite la démocratie dans le monde, qu'ils ne viennent pas après s'étonner que les peuples n'aient plus confiance dans les hommes et les partis politiques ! Bref, plein de monde pour crier sa colère. Du monde ! Il en arrive encore, par toutes les rues ! Chaque bout de cortège qui s'ajoute est salué d'une clameur et il y en a presque toutes les cinq minutes. La manifestation prend de l'ampleur.
 
Le cortège s'ébranle lentement, très lentement, lourdement, handicapé par le poids du nombre, par l'étroite Rue Peel. Trop étroite d'ailleurs, ça fait entonnoir, j'ai de la chance d'être pas loin de la tête du cortège. Enfin pas loin... Pas trop loin... mais je ne vois pas le bout ! Avant de dépasser complètement l'angle, j'aperçois un second cortège s'ébranler par une rue parallèle, tant il apparaît que nous ne passerons pas tous par une seule rue.

 
Nous bifurquons Rue Sherbrooke. Pas un seul policier pour canaliser les manifestants. En revanche, de nombreux Montréalais viennent assister au défilé, la plupart acceptant de porter le carré rouge, symbole fort s'il en est. Par les rues adjacentes, les cortèges secondaires nous rejoignent... ou renoncent pour suivre des axes parallèles au vu de la foule qui emplit la voie. C'est à ce moment que ce qui promettait d'être une manifestation d'ampleur peu banale est devenu un évènement historique.
 

Partout, de partout, tout n'était que soutien ! Des drapeaux rouges fleurissaient sur les toits. Le très conservateur McGill College, depuis la matinée, s'était bougé et arborait maintenant carrés rouges et pancartes "McGill en grève !" tandis que certains de ses étudiants et professeurs rejoignaient le cortège au passage. Des immeubles d'habitation, les gens aux balcons et aux fenêtres arboraient leur soutien : signes amicaux avec des T-shirts rouges, nappes et draps rouges accrochées aux balustrades, que sais-je encore ! Chaque boîte et entreprise montrait des pancartes assurant notre cause du soutien des salariés et des syndicats. Chaque minute qui passait voyait notre manifestation enfler, grossir. Le summum entre 15h et 16h. Sortie des écoles. Les enseignants non-grévistes et leurs élèves ont à leur tour épinglé des carrés rouges sur leurs vêtements, ont même sorti des pancartes des établissements scolaires et ont rejoint le mouvement. Mieux ! Des parents, messieurs-dames, avec leurs enfants, parfois même en poussettes à la sortie des crèches, rejoignaient de bonne grâce la manifestation, presque tous avec des pancartes : "Parents solidaires !", "Un avenir pour nos enfants !", "Nous voulons pouvoir payer des études à nos enfants !" et d'autres du même genre. Pour finir, des retraités, des anciens de la Révolution Tranquille et qui descendaient en 2012 défendre avec nous les droits qu'ils avaient acquis de la même manière en 1960.



La consécration : la bifurcation dans la Rue Berri. Nous apprenons que l'arrière du cortège n'a toujours pas quitté la Place du Canada, la manifestation s'étend donc en continu sur près de cinq kilomètres et ce n'est pas fini. Les défilés des rues parallèles, résignés à ne pouvoir se joindre au corps principal, nous font une haie d'honneur sur les ponts des routes perpendiculaires. Le moment est intense, c'est (je crois), à ce moment que nous prenons conscience que nous vivons un moment exceptionnel dans l'Histoire du Québec. Une gigantesque clameur s'élève, un cri de joie et de colère, poussé d'une seule voix par près de 300.000 personnes et qui résonne dans tout Montréal, répercuté par le Saint-Laurent. Que c'est beau, un peuple en colère !
 

Même une violente averse orageuse n'entame pas notre enthousiasme. Nous atteignons finalement la Rue Notre-Dame, l'arrière du cortège est toujours Place du Canada... Pêle-mêle, la foule essaye de s'entasser sur la Place-Boulevard Jacques CARTIER, autour de la Colonne Nelson, sans y parvenir, c'est tout le centre-ville de Montréal qui est occupé d'une marée humaine au drapeau rouge. C'est hélas l'heure pour moi de rejoindre mon autobus, et je dois longer le fleuve pour pouvoir marcher sans piétiner personne. Vu de loin, le spectacle est magnifique. Où que porte mon regard, ce n'est que foule en délire et drapeaux au vent. Le discours, heure de gloire d'un orateur dont je n'ai pas retenu le nom, n'a sûrement pas été bien entendu par tout le monde, mais il restait bien 200.000 personnes pour acclamer chaque fin de phrase. Je me souviendrai toute ma vie de ce jour.

 
III Les incidents.
 
Je vous avoue que j'avais un peu peur dans l'autobus. Tant du côté étudiant que du côté policier, ça ne s'était jamais très bien passé à Montréal depuis le début de la grève. Les encadrants n'étaient pas là pour nous rassurer : consignes contre les gaz, consignes de sécurité drastiques et numéro de téléphone de l'avocat marqué sur le bras en cas d'arrestation...
 
Et puis... Rien. Mais alors, rien ! Depuis, on a su que quelques étudiants montréalais avaient essayé, vers 8h30 du matin, de bloquer le Port de Montréal mais ont été dispersé sans violences par la police. Mais à part ça rien du tout !
 
Cela aussi restera gravé dans l'Histoire. Si je devais paraphraser François MITTERRAND (1916-1996), je parlerais de cette "Force tranquille" si particulière au peuple québécois. Réunir 300.000 personnes en colère pour manifester sans qu'aucun (et je dis bien "aucun") incident ne soit à déplorer, ça tient de l'exploit. Les organisateurs de la manifestation ont reçu les félicitations officielles de la part de la Police de Montréal et des Forces de Sécurité du Québec, ce qui n'est jamais arrivé non plus dans l'Histoire.
 
Tiens, parlons-en de la police. On ne l'a pas vue. Ou si peu. Gestion intelligente de la part des forces de sécurité. Pas de présence trop marquée pour éviter toute provocation qui aurait pu dégénérer. J'affirme que nous étions suffisamment nombreux pour rayer la ville de la carte en cas d'émeute, à moins d'une intervention armée qui aurait entraîné avec elle la chute du gouvernement.
 
Les casseurs, oui bien sûr il y en avait. J'en ai vu. L'air complètement paumé. Pas de policiers à provoquer et surtout beaucoup trop de monde ! La plupart ont jeté bas les masques pour aller distribuer pacifiquement des tracts avec leurs collègues anarchistes. Les autres, devant le regard croche de centaines de gens en même temps, ont préféré se faire oublier avant d'être pendus au lampadaire le plus proche par une foule hostile. ^^
 
IV Participants, réactions et postérité.
 
Entre 200.000 et 300.000 personnes. Sûr. Même les médias (qui appartiennent presque tous aux Libéraux, donc au gouvernement) n'ont pas réussi à minimiser l'affaire. Ne serait-ce que parce que les photos démentent à elles seules le "quelques dizaines de milliers de personnes" que certains journaleux se sont crus obligés d'écrire. La fourchette basse, officielle, annoncée par le gouvernement, est de 200.000 personnes. Même les médias, au cœur de leurs articles, ont été obligé d'admettre qu'il y avait pas loin de 300.000 personnes au plus fort de la manifestation.
 
Line BEAUCHAMP (1963- ), Ministre de l'Éducation et Vice-Première Ministre de la Province canadienne du Québec, a décrété qu'elle était prête à négocier pour peu que les étudiants acceptent la hausse des frais de scolarité. Là... Je vois que deux options. Ou elle n'a rien compris à rien ou elle nous prend pour des cons andouilles.
John James "Jean" CHAREST (1958- ), Premier Ministre de la Province canadienne du Québec, décrète que le gouvernement ne reculera pas, que c'est trop tard et qu'on avait cas le dire avant qu'on était pas d'accord. Comme si on nous avait demandé notre avis. Enfin si, soyons honnêtes, on nous l'a demandé. L'an passé. La hausse avait été refusée à 85%. Depuis, le gouvernement refuse de reconnaître les syndicats étudiants comme interlocuteurs car non encore sur le marché du travail donc hors cadre de la Loi du Travail. Faut pas s'étonner après si on lui gueule dans les oreilles ... Je crois surtout qu'il boude et qu'il essaye de digérer le fait qu'il restera, aux yeux de l'Histoire, comme le plus impopulaire et le plus contesté des Premiers Ministres de la Province du Québec. Mettre 300.000 personnes dans la rue, ça ne s'était jamais fait. On se souviendra de lui pour ça. Bien fait !
 
Car oui, cette manifestation est historique. Même lors de la Révolution Tranquille, même durant les contestations à la fin de la Grande Noirceur (1944-1959) contre les conservateurs cléricaux de l'Union Nationale, jamais autant de monde n'était descendu en même temps dans la rue, même si l'ont tient compte des proportions démographiques entre les deux périodes. Ca ne s'était jamais vu, ça ne s'était jamais fait dans l'Histoire du Québec, tout simplement. 300.000 personnes, à populations proportionnelles, ça correspond à environ 2,4 millions de personnes en France. À manifester dans une seule ville. Car cela ne tient pas compte de tous ceux qui sont restés dans les universités et CÉGEP (Collèges d'Enseignement Généraux Et Professionnels) du Québec pour faire des lignes de piquetage de grève devant les cours pour empêcher leur tenue. Je pense que pas loin de 500.000 personnes étaient en protestation ce jour.
 
Ce jour ? Jeudi 22 Mars 2012. Sans vraiment le vouloir de cette ampleur, nous avons pourtant marqué l'Histoire du Québec, et les historiens se pencheront sur la protestation étudiante de 2012 rien que pour cela, tandis que dirai fièrement à mes petits-enfants que j'y étais (et que non, il n'y avaient ni dinosaures ni mammouths). Je ne sais pas si le mouvement va prendre de l'ampleur au point que nous parlerons de Printemps Érable. Je ne sais pas qui du gouvernement ou du mouvement va caler en premier. J'ignore si nous écrivons une page d'Histoire ou si nous nous contentons d'en émarger une autre. Ce que je sais, c'est que j'ai participé jeudi à quelque chose d'exceptionnel, et que j'en suis fier. Je n'oublierai jamais.
 
Je me souviendrai.

mardi 20 mars 2012

Mardi 20 Mars 2012.

17°C au thermomètre, 20°C annoncés demain, même s'il faut s'attendre à un dernier coup de froid, ça sent le printemps !


Interlude.

"Chant des Jeunes Gardes" ou "La Jeune Garde" (~1920 ou 1936), Gaston Mardochée BRUNSWICK "Montéhus" (1872-1852).


Lundi 19 Mars 2012 : Grève général illimitée.

Toujours pour protester contre la hausse de 1.625$CAN des frais de scolarité imposée par le Parti Libéral du Québec (P.L.Q.) alors au pouvoir dans la Province canadienne de Québec, les étudiants en 2ème Cycle (Maîtrise) et 3ème Cycle (Doctorat) étaient invités à se prononcer pour ou contre la grève générale illimitée reconductible lors d'une Assemblée générale extraordinaire de l'ÆLIÉS (Association des Étudiants et des Étudiantes de Laval Inscrits aux Études Supérieures).


Premier essai le Mardi 13 Mars 2012, au local 1112 du Pavillon Adrien POULLIOT, un grand amphithéâtre. Précisons ici qu'un très fort mouvement étudiant avait secoué le Québec en 2005 et qu'à situation comparable, l'ÆLIÉS avait réuni en assemblée générale de grève un peu plus de 800 personnes. Le comité exécutif avait donc prévu deux locaux, contenant suffisamment de places pour accueillir autant de monde. Ouverture de la séance à 18h30. Dans les faits, à 19h ça continue de s'entasser dans les couloirs et de rentrer. À 20h, de plus en plus de monde, il est clair que nous ne rentrerons pas tous, on parle de 1.500-2.000 personnes, pour représenter les 11.000 étudiants aux cycles supérieurs. La Sécurité de l'Université Laval s'inquiète d'un tel regroupement , l'Assemblée Générale est reportée à une date ultérieure et dans un lieu plus vaste. Dommage, je n'avais pas mon appareil ce premier soir, c'était assez impressionnant entassés à 900 dans une salle de 450 places.

Deuxième essai, Lundi 19 Mars 2012, dans le stade intérieur du Pavillon d’Éducation Physique et Sportive (PEPS) dont les cours de tennis et d'athlétisme ont été annulés. Cette fois, le comité exécutif a vraiment bien fait les choses. Un filtre complet et efficace des étudiants, des bureaux alphabétiques pour le vote à bulletin secret, des rangées de chaises impeccables, une sono, la totale. Coût de l'opération : entre 4.000$CAN et 5.000$CAN. À ne pas recommencer trop souvent, ça coulerait l'association financièrement parlant.



On nous fournit des cartons pour le vote à main levée... des cartons rouges ! Rouge, symbole des grévistes ! Le comité s'en excuse et s'en explique, ils avaient demandé à la reprographie des feuilles d'une seule couleur en nombre suffisant pour 3.000 personnes... et la reprographie leur a envoyé du rouge. D'ailleurs nous n'étions pas 3.000, 1.500 tout au plus, 1.200 environ. L'échec de la semaine passée a servi de douche froide. Mais c'est quand même relativement gigantesque pour une assemblée générale.


Rapide bilan de la séance.
_Il a été proposé un référendum électronique pour décider la grève, car une assemblée générale n'est pas démocratique ni représentative. Proposition repoussée à majorité.
_Il a été proposé un vote électronique. Repoussé à majorité.
_Il a été discuté des modalités de la grève.
_La grève en elle-même a été proposée, s'en est suivie une séance plénière de trente minutes, qui a servi d'entracte, cela faisait presqu'une heure et demi que les débats duraient.
_Un amendement a été demandé sur les modalités de la grève. Repoussé à majorité.
_Dans une dernière tentative de bloquer la grève, constatant la majorité des carrés rouges (contre la hausse et pour la grève) dans la salle, un carré bleu (contre la hausse et contre la grève) a tenté de mettre en avant un défaut de procédure, rejeté par démonstration par le comité exécutif.
_Le vote secret a été demandé pour le vote crucial, immédiatement contré par une demande de vote ouvert. Par majorité, le vote à main levé est décidé.
_À 22h15, après 2h30 de débat, la grève générale illimitée reconductible chaque semaine est votée, par 625 (et non pas 725 comme je le disais dans mes courriels, désolé) voix contre 472 et 29 abstentions. Les grévistes laissent éclater leur joie. Un tiers des personnes présentes (de tous les bords malgré une majorité d'opposants à la grève) quitte la salle.
_La clôture de la séance est demandée. Repoussée à majorité.
_Les modalités de reconduction sont discutées.
_Étant entendu du coût d'une telle assemblée générale et de l'impossibilité physique des membres du comité exécutif de supporter une telle organisation chaque semaine, la reconduction par vote électronique hebdomadaire est approuvée à majorité, sous condition qu'en cas de proposition gouvernementale une assemblée générale soit tenue.
_La séance est close à 22h35, après presque quatre heure de débats.


C'est ainsi que 11.000 étudiants supplémentaires viennent grossir les rangs des grévistes. Des actions sont prévues en plus des manifestations, tous les cours seront piquetés et ne pourront être donnés. Nombre de professeurs soutiennent le mouvement, ça démarre bien.

Les débats se sont tenus respectueusement, condition nécessaire vu la foule rassemblée. Pour ne pas intimider les orateurs, il a été convenu d'applaudir en langage des signes ! ^^ Les carrés verts (pour la hausse et contre la grève) ont axé leur argumentation sur le caractère non démocratique d'une assemblée générale et ont tenté de repousser le vote de toutes les manières possibles. Ils se sont montrés agressifs mais non convainquant. Ils ont tenté de jouer la corde sensible, mais n'ont su que répondre lorsqu'on leur a fait remarquer que la grève gênait tout le monde et que l'assemblée générale permettait au moins d'en discuter, ce qui n'est pas le cas d'un vote électronique. Par ailleurs, les orateurs verts étaient, je trouve, moins brillants que les orateurs rouges, moins clairs, moins sûrs d'eux. Sachant que la plupart des verts sont en École d’Administration et sont issues des Jeunesses Libérales, ça ne nous promet pas des politiciens de haut niveau, s'ils peuvent se faire planter par des orateurs du peuple. ^^ Plus sérieusement, ceux qui ont vraiment joué la corde sensible sont les carrés bleus, qui ne parviennent pas à se faire écouter, méprisés par les verts, incompris par les rouges, mais qui ont au moins exprimé leur point de vue.


Enfin bref, me voilà en train de refaire mon bilan historiographique avec la satisfaction personnelle d'être en grève ! ^^ Il n'est pas dit que je ne participe pas à des piquetages, je suis même tenté d'aller à Montréal jeudi, mais je continue de bosser. C'est encore plus beau lorsqu'on peut défendre ses intérêts en même temps que ceux du peuple !

Dimanche 18 Mars 2012 : seconde prise de la Bastille.

Non, ce n'est pas de celle-là qu'on parle. ^^ Celle-là a eu lieu un certain 14 Juillet 1789, ça commence à dater.

 
Non, il s'agit juste d'un petit article pour tirer un grand coup de chapeau à monsieur Jean-Luc MÉLENCHON (1951- ), coprésident du Parti de Gauche et candidat à l'élection présidentielle de 2012 sous l'étiquette du Front de Gauche. Vous pouvez le voir ci-dessous en compagnie de Marie-Georges BUFFET (1949- ), ancienne secrétaire générale du Parti Communiste (2001-2010).
 
 
Déjà, je n'ai jamais caché mes sympathies pour le Front de Gauche, cette alliance créée en 2009, initialement pour changer l'Union Européenne libérale en une Europe sociale, et qui rassemble le Parti de Gauche (P.G.), le Parti Communiste Français (P.C.F.), le Parti Communiste des Ouvriers de France (P.C.O.F.), Gauche Unitaire (G.U.), la Fédération pour une Alternative Sociale et Écologique (F.A.S.E.), la branche Convergences et Alternative du Nouveau Parti Anticapitaliste (N.P.A.), et une part non négligeable du Mouvement Républicain et Citoyen (M.R.C.) depuis le retrait de Jean-Pierre CHEVÈNEMENT (1939- ) de la course à la présidentielle. De ce parti, l'idée d'une VIème République Française sociale et parlementaire me plaît, ainsi d'ailleurs que le programme économique et la volonté de créer une Europe sociale. Dommage, ça manque un peu de solidité au niveau de l'éducation et sur certains autres points. Mais bon...
 
 
Ensuite, parce qu'il fallait oser lancer un appel à un meeting en pleine rue, au cœur de Paris, au pied de la Colonne Vendôme, sur la très symbolique Place de la Bastille. Et surtout, ce n'était pas gagné d'avance de réunir près de 100.000 personnes ! Se pourrait-il donc que l'idéal socialo-communiste ne soit pas mort ? Se pourrait-il que ce courant surpasse le néo-fascisme du Front National (F.N.) et de Marine le PEN (1968- ) ? Certes, ça prend des voix à François HOLLANDE (1954- ) et au Parti Socialiste (P.S.), seul apparemment capable de parvenir à la Présidence de la République en virant le nabot néo-libéral qui occupe le poste actuellement. Mais voilà, ça me redonne espoir. Je soutiens, je souscris. L'Internationale n'est pas morte, la Sociale non plus. On y croit, camarades, on y croit !
 
 
 

Interlude.

La chanson parle de la Tunisie, mais l'auteur a connu l'exil d'Algérie.

Patrick Maurice BRUEL BENGUIGUI (1959- ), "Au Café des Délices" (1999).
 
 

Dimanche 18 Mars 2012 : Souvenirs d'Algérie.

Dans cet article, il va falloir que je fasse attention à ce que je vais dire, j'ai quelques Pieds Noirs dans ma famille et je sais que pas mal d'Algériens passent sur mon blog et me mettent souvent des mots gentils. Il ne faudrait vexer personne.

En fait, cet article va vraiment être à l'image de ce cinquantenaire particulier.

Il y a cinquante ans, le 18 Mars 1962, la Vème République Française et le Front de Libération Nationale signaient les Accords d'Evian, mettant fin à la Guerre d'Algérie (1954-1962).


Une sale guerre, une guerre coloniale, la deuxième menée par la France après la Guerre d'Indochine (1945-1954). La France qui sortait tout juste de la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) et de l'occupation allemande et nazie, et qui se posait donc parmi les vainqueurs comme les champions de la liberté, pour s'engager dans des conflits visant à défendre son empire colonial contre des peuples luttant pour leur indépendance et la liberté... Enfin...

L’Algérie était une colonie française depuis 1830, se composait de plusieurs Départements français où les Français installés, plus d'un million de "Pieds Noirs", avaient le droit de vote. Une des plus ancienne et des plus prestigieuse possessions de l'Empire colonial de la France.

Au delà des divergences politiques, François MITTERRAND (1916-1996) déclarait "L'Algérie c'est la France" alors même que la plupart des Socialistes souhaitaient la fin du conflit tandis qu'à droite on retrouvait les mêmes divergences, cette guerre a profondément ébranlé la France. Elle fut directement à l'origine de la crise qui a précipité la chute de la IVème République et l'avènement du régime très présidentiel de la Vème République, dirigé par la poigne de fer du Général Charles de GAULLE (1890-1970). Celui-là même qui prononcera la phrase la plus ambigüe et la plus acclamée de l'Histoire à Alger : "Français, je vous ai compris !" s'attirant la joie d'Algériens sentant venir l'indépendance et de Pieds Noirs certains désormais que la France ne les abandonnerait pas.


Une sale guerre, dont ceux qui sont revenus étaient traumatisés à vie, mon grand-oncle l'a faite et je sais qu'il ne s'en est jamais vanté. On ne saura jamais exactement combien d'Algériens ont laissé la vie dans ce conflit, peut-être un peu moins d'un million...


Les Pieds Noirs ont été forcé de tout quitter en 1962 après la défaite de la France. Peut-on leur en vouloir de dire que l'Agérie était leur patrie ? 99% d'entre eux n'avaient jamais vu la France, leurs parents non plus, et rares étaient ceux qui gardaient des contacts réguliers avec leur famille en métropole. Ils ont quitté la terre qui les a vu naître et grandir, abandonné leurs meubles, leurs affaires et leurs maisons, se sont entassés dans des bateaux pour débarquer à Marseille, en terre inconnue, comme des étrangers. Que dire des Harkis, ces Algériens "collaborateurs", expulsés d'Algérie sous peine de représailles, accueillis en France comme des parias et des immigrants, non reconnus comme réfugiés politiques et parqués dans la misère...


Et peut-on en vouloir aux Algériens qui venaient de se libérer d'une puissance étrangère de se sentir enfin libres sur leur terre ?

Longtemps la France a refusé d'affronter son passé. On a parlé des "évènements d'Algérie", ce qui est insultant pour tout le monde : les Algériens qui ont quant même gagné leur indépendance dans l'affaire, les militaires qui ont été s'y faire tuer et les Pieds Noirs qui ont tout perdu. On a finalement accepté de parler de "Guerre d'Algérie", puis de reconnaître peu à peu les massacres commis par les deux camps, le manque de reconnaissance envers les Pieds Noirs et les Harkis.

Mais les plaies sont encore à vif. Les Pieds Noirs restant étaient enfants en 1962 et sont les plus marqués par le départ. Beaucoup d'Algériens se sont installés en France, par après, fuyant un régime instable émaillé de violences.

La France et l'Algérie... Une histoire d'amour et de haine qui n'est pas prête de s'achever.

lundi 12 mars 2012

Interlude.

"Le noir te va si bien" (1972), de Jean MARSAN (1920-1977), mise en scène de Jean le POULAIN (1924-1988) qui joue aussi le rôle du colonel John McLESBY (alias Jules TROMBONE). Avec Simone Maria PACÔME (1923- ) dans le rôle de lady Lucie GUILVAILLANT et Jean-Simon PREVOST dans le rôle d'Arthur GORDON de Baskerville. Cette scène fut filmée dans le cadre de l'émission "Au théâtre ce soir" de Pierre SABBAGH (1918-1994), au Théâtre Edouard VII à Paris le Samedi 31 Mai 1975 et diffusé sur TF1 le 26 Décembre de la même année.
Sur des décors de Roger HARTH (1927-1982) et des costumes de Donald CARDWELL (1935-2004).
Montez le son.

Acte I, Scène 2.



Acte II, Scène 1.



Acte II, Scène 3.
 
 

Jeudi 8 Mars 2012 : petite soirée au théâtre.

La semaine passée, je reçois un appel de mon ami Alex qui m'invite à une soirée au théâtre, pour voir une pièce que j'apprécie particulièrement.

Et oui ! Rien de moins que "Le noir te va si bien" (1972) de Jean MARSAN (1920-1977). À l'Auditorium du Juvénat de Notre-Dame-du-Saint-Laurent, jouée par une troupe d'amateurs, La Troupe de Théâtre de la Régie des Rentes. La mise en scène est complètement copiée sur celle de Jean le POULAIN (1924-1988), mais on ne peut vraiment pas leur en vouloir !

Synopsis :
Le Colonel John McLESBY a été marié six fois, et ses six femmes sont mortes, lui laissant à chaque fois une fortune considérable. Lady Lucy KALFAYAN a été mariée cinq fois, et ses cinq époux sont morts en lui lassant à chaque fois une fortune considérable. Ils n'ont jamais pu être accusés, ignorent tout l'un de l'autre et sont tous deux maintenant très très riches. Profitant de la vente du manoir familial par Dorothy BAKER, sœur de Lady Lucy, le Lieutenant Peter CAMPBELL de Scotland Yard va les réunir en se faisant passer pour un agent immobilier auprès du Colonel, en attendant un flagrant délit lors d'une lune de miel pour le moins agitée !

Avec :
Gilbert OUELLET dans le rôle du Colonel John McLESBY alias "Jules TROMBONNE".
Kimberley ANGELL dans le rôle de Lady Lucy KALFAYAN.
Lucie BOUCHARD, véritablement hilarante, dans le rôle de Dorothy BAKER.
Paul  LÉPINE (metteur en scène) dans le rôle d'Arthur GORDON, fiancé de Dorothy BAKER et cousin de la famille BAKER-KALFAYAN.
Christian SIMARD dans le rôle du Lieutenant Peter CAMPBELL.
Françoise PRÉFONTAINE dans le rôle de Polly BAKER, fille de Dorothy BAKER.
Sylvain LAMBERT dans le rôle du Brigadier Robert.
Joëlle LAVIOLETTE dans le rôle du Sergent Jennifer et dans celui de la Diablesse.
Un très grand coup de chapeau à tous ces comédiens qui nous ont fait passer une bonne soirée !


Rien à dire sur le jeu et la mise en scène. Des amateurs qui mettent tout leur cœur et toute leur passion dans une pièce, on est jamais déçu. Le résultat est très positif, on rit du début à la fin, sans temps mort, pendant deux heures. Mention particulière à l'équipe technique pour les décors, car sans ça la pièce n'aurait pas eu la même saveur et les comédiens pas les mêmes possibilités de jeu.

Bref, une excellente soirée, très divertissante. Alex a découvert la pièce et l'a également trouvée très drôle, ce qui lui a fait comprendre mon engouement pour cette œuvre du théâtre de boulevard. Affaire à suivre ! Un de mes rêves reste toujours de la mettre en scène et d'y jouer.

dimanche 11 mars 2012

Encore un départ d'un homme discret.

Pierre TOURNADRE "TORNADE" (1930-2012) est décédé le Mercredi 7 Mars 2012 dernier, des suites d'une chute accidentelle dans ses escaliers, à l'âge de 82 ans.

Pierre TORNADE, on s'en souvient au théâtre, on s'en souvient pour ses seconds rôles (je ne citerai ici que ceux j'ai le plus apprécié, à savoir le Capitaine DUMONT dans la "Septième Compagnie" [1973 & 1975], et le Commissaire FAROUX dans "Nestor Burma" [1991-1998]), sa participation aux films des Charlots (dont l'un des membres, Gérard RINALDI [1943-2012] est décédé le Vendredi 2 Mars 2012), mais aussi et surtout pour sa voix, qui doublait Obélix (et parfois Abraracourcix) dans les dessins animés et les jeux vidéos d'Astérix.





Un petit extrait du film "Je sais rien mais je dirai tout" (1973), de et avec Pierre RICHARD (1934- ), où l'on retrouve le regretté Pierre TORNADE en commissaire assisté du pas très fin agent Morel (Daniel PRÉVOST [1939- ]) face à un Pierre RICHARD au mieux de sa forme, à un troublant Bernard BLIER (1916-1989) et à un très bafouillant Pierre REPP (1909-1986).


vendredi 2 mars 2012

Jeudi 1er Mars 2012 : Manifestation contre la hausse des frais de scolarité.

Ca couvait depuis plusieurs mois déjà.

L'an passé, il avait été question que le Parti Libéral du Québec, alors au pouvoir dans la Province de Québec, double les frais de scolarité, arguant que, avec la crise, manque de budget, tout ça, pis que c'était pas si grave puisque finalement ça resterait quand même les frais les moins chers d'Amérique du Nord. C'était juste oublier que la plupart des étudiants sont déjà endettés, que les emplois étudiants, bien que plus accessibles et pratiques qu'en France, ne peuvent suffire à assurer de telles dépenses, et que surtout la politique historique du Québec depuis la Révolution Tranquille des années 1960 est d'atteindre la gratuité scolaire.

Forcément, à l'Automne 2011, les associations étudiantes ont commencé à bouger, et à se prononcer majoritairement contre la hausse des frais de scolarité et à faire remonter leurs doléances au gouvernement, qui a fait la sourde oreille. Et a fait ses coupes dans le budget, aspergeant au passage les Collèges d'Enseignement Général et Professionnel (C.E.G.E.P.), qui font la transition sur deux ou trois ans entre l'école secondaire et les universités OU le monde du travail. Ces-derniers ont donc vu leurs vivres coupées, forçant les établissements à augmenter les frais d'inscription, fermer des cafétérias étudiantes, fermer des clubs, parfois même couper l'électricité ou l'eau à partir d'une certaine heure. Quant aux universités, le couperet est tombé, 1625$CAN de plus sur la facture, ce qui ferme la porte des universités à environ 7000 étudiants par an qui, bourses ou prêts ou pas, n'auront plus les moyens d'accéder aux études supérieurs. Modèle américain, quand tu nous tiens...

Donc cet hiver, ça s'est durci, d'autant qu'en opposition aux "Carrés Rouges", étudiants contre la hausse, sont apparus des "Carrés Verts", minoritaires, étudiants qui se disent pour cette hausse mais dont le noyau dur est composé de membres du P.L.Q.. Devant la réaction dure du gouvernement, le mouvement étudiant s'est également renforcé. Les associations étudiantes ont d'abord toutes votées des levées de cours à des jours définis pour organiser des manifestations à Québec ou à Montréal, comme celle d'hier. Et depuis une semaine, il est question de grève générale, les cégepiens nous ont rejoint. J'ignore ce que cela va donner, mais pour l'instant ni l'un ni l'autre camp n'est prêt à céder.

Et hier, manifestation à Québec. 10.000 personnes attendues, environ 5.000 présentes, le gouvernement a été bien aidé par la météo. Le vent fret et une neige en poudrerie ont sûrement dissuadé pas mal de monde. Résultat, il y avait presque plus de Montréalais et autres que de Québécois... Le cortège, parti du Parc des Braves sur le Chemin Sainte-Foy, a bifurqué pour venir perturber le trafic des autobus sur le Boulevard Laurier, avant de continuer vers la Grande Allée, histoire de déranger les trois grands axes. En chemin, nous avons été rejoints par des mouvements grévistes solidaires de la grève étudiante, tandis que des banderoles de soutiens ornaient certains bâtiments.






Une fois devant le Parlement, face à un très fin cordon de policiers, la manifestation a largement dépassé les barrières de protection, trop petites. Instantanément, des Forces de Sécurité (l'équivalent de nos C.R.S. : Compagnies Républicaines de Sécurité), que le groupe humoristique québécois appelle "notre Produit Intérieur Brut", sont sorties du bâtiment et sont venues se ranger en ligne face à nous. Allez savoir par quel hasard de la foule je me suis retrouvé, avec mon drapeau québécois (la bonne excuse pour lui faire prendre l'air), en deuxième ligne. Enfin bref. Sans que cela tourne à l'altercation violente, il y a eu quelques jets d’œufs à peinture et de balles de neige depuis le cortège, et les Forces ont riposté... au gaz lacrymogène. Une grenade a éclaté à trois mètres sur ma droite et je fus pris sous le vent, tandis que la ligne de sécurité nous repoussait, fermement mais sans violence autour de la Fontaine de Tourny. Protégé par mes lunettes et mon écharpe, je ne souffrais pas trop des gaz, mais des étudiants autour de moi ont souffert, ainsi qu'un policier qui avait mal ajusté son masque à gaz. Tout ce beau monde fut pris en charge gentiment par les policiers, aucune interpellation.












Après cette dispersion un peu forcée, une partie du cortège est restée sur place, à moins d'un mètre du cordon de sécurité, plus par esprit festif qu'autre chose (j'entendis même le refrain de "La Marseillaise", ça m'a fait sourire) tandis que je me dirigeais le Boulevard Laurier pour regagner mes pénates. J'eus à traverser un autre cordon de sécurité, à l'air plus agressif car faisant face à la partie du cortège où flottait les couleurs du Réseau de Résistance Québécois (R.R.Q.). Aucun incident à déplorer.



Le gouvernement reste sur ses positions, nous aussi. La grève générale commence à être à l'ordre du jour. Reste à voir comment ça va tourner. Quant à moi, côtoyer le Drapeau des Patriotes, le Drapeau Rouge et marcher avec le Drapeau Québécois, ça n'a absolument pas choqué ma fierté de Français (même pas en marchant sous la fleur de lys). Je suis pour la solidarité des peuples.